Le blog Droit administratif

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06 11 2022

6 novembre 2022

[Chronique 2022/11] Le Conseil d’État donne également son avis sur les réseaux sociaux

Dans la continuité récente d’une série de thématiques très liées au champ numérique le Conseil d’État a intitulé son étude annuelle 2022 « Les réseaux sociaux : enjeux et opportunités pour la puissance publique ». Qu’à cela ne tienne et comme un auteur l’a également remarqué[1], « Si, pendant longtemps, les États ont semblé renoncer à intervenir, laissant à ces plateformes numériques le soin de se réguler elles-mêmes, une telle retenue n’apparaît plus possible aujourd’hui, compte tenu, d’une part, de l’importance qu’elles ont de fait acquise, d’autre part des insuffisances de l’autorégulation, que de multiples dysfonctionnements voire scandales ont récemment mis en lumière »[2]. Si évoquer un retour de l’État a l’allure d’un slogan un peu simpliste il reste que cette étude annuelle exprime, de la part de ses auteurs, la volonté de justifier une réappropriation du cadre normatif des réseaux sociaux. Comme le rappelle […]

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02 09 2022

2 septembre 2022

[Chronique 2022/09] Une loi Avia bis devant le Conseil constitutionnel ?

Le législateur semblant rejouer la partie de la loi Avia[1], l’entrée en vigueur du règlement (UE) 2021/784 du 29 avril 2021[2] relatif à la lutte contre la diffusion des contenus à caractère terroriste en ligne, pourtant d’application direct, a été l’occasion d’une loi de transposition[3]. Cette loi a été soumise au contrôle du Conseil Constitutionnel dans les conditions de l’article 61 de la Constitution lequel a rendu sa décision le 13 août 2022[4]. On peut rappeler que dans le cas d’une loi de transposition le Conseil Constitutionnel s’astreint à confronter ladite loi avec d’éventuels principes inhérents à l’identité constitutionnelle de la France[5]. Toutefois, le Conseil constitutionnel relève que le règlement susmentionné laisse aux États membres une marge d’appréciation pour trois composantes du régime du retrait des contenus à caractère terroriste à savoir le choix de l’autorité compétente pour prendre une […]

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01 06 2022

1 juin 2022

Le port du « burkini » à nouveau en question devant le juge administratif. Brèves observations sous l’ordonnance du tribunal administratif de Grenoble du 25 mai 2022, n°2203163.

« Laïcité : le mot sent la poudre » , et l’actualité récente, qui a amené le tribunal administratif de Grenoble à rendre son ordonnance du 25 mai 2022, n’est pas sans rappeler cette fameuse formule de J. Rivero. En effet, le 16 mai dernier, une délibération du conseil municipal de la ville de Grenoble a mis le feu aux poudres en approuvant le nouveau règlement intérieur des piscines municipales, dont l’article 10 a notamment pour effet d’autoriser le port du burkini dans les piscines de la ville.

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02 05 2022

2 mai 2022

La Cour de justice de l’Union européenne maintient une jurisprudence difficilement conciliable avec la position du Conseil d’État en matière de surveillance numérique

Dans une décision G. D. contre Commissioner of An Garda Síochána du 5 avril 2022[1] la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE) revient sur l’encadrement de la surveillance numérique. Si cette affaire ne concerne pas directement la France, impossible de penser que le gouvernement ne s’y est pas intéressé notamment en raison du fait qu’avec onze autres, l’État français a produit des observations au soutien du dispositif irlandais de surveillance numérique prévu par une loi de 2011[2]. Cette loi prévoit une obligation de conservation de données par les fournisseurs de services de communications analogue à celle que l’on trouve en France à l’article L. 34-1 du Code des postes et des communications électroniques. La durée de conservation est différenciée selon la catégorie de données que le fournisseur doit conserver. Il est par suite possible à un officier de police […]

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01 03 2022

1 mars 2022

Un Conseil constitutionnel apparemment plus strict que le Conseil d’État vis-à-vis de la surveillance numérique de masse

Depuis plusieurs mois, les plus hautes juridictions du pays sont chacune à leur tour confrontées à la difficile question de la surveillance numérique de masse. On proposera à la fin de l’article un récapitulatif des décisions importantes rendues sur cette question après avoir fait état de la plus récente actualité en la matière. Ainsi, dans une décision n° 2021-976/977 QPC du 25 février 2022, rendue consécutivement à une question prioritaire de constitutionnalité présentée devant la chambre criminelle de la Cour de cassation, le Conseil Constitutionnel a censuré plusieurs dispositions législatives. En l’espèce il était question de l’article L. 34-1 du Code des postes et des communications électroniques (CPCE) prévoyant un principe d’anonymisation des données de trafic (L. 34-1 II) nuancé par plusieurs réserves (L. 34-1 II et III) figurant dans le même article. La mise en œuvre de ces réserves […]

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04 05 2020

4 mai 2020

Quel rôle pour le Conseil d’État dans le confinement des libertés ?

Dans un entretien accordé au Figaro, le président du Conseil constitutionnel a indiqué à propos de la crise liée au covid-19 qu’elle « n’autorise en rien que l’on mette entre parenthèses les droits et libertés. Il se peut simplement que la réalité d’une crise justifie que, de manière temporaire, ces exigences se concilient selon des modalités particulières ». Mettre un voile sur la liberté, comme l’on cache les statues des Dieux, aurait dit Montesquieu.

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03 06 2019

3 juin 2019

Affaire Vincent Lambert : retour fracassant de la guerre des juges, ou preuve de l’efficacité du système français de protection des droits fondamentaux ?

Par son arrêt du 20 mai 2019 sur l’affaire Vincent Lambert, la Cour d’appel de Paris a ordonné à l’Etat français de prendre toutes mesures aux fins de faire respecter les mesures provisoires demandées par le Comité international des droits des personnes handicapées de l’ONU. Ce faisant, elle a manifestement choisi d’empiéter sur le terrain du juge administratif, au risque de méconnaître les règles de répartition des compétences entre les deux ordres de juridiction.

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23 10 2018

23 octobre 2018

L’ordre public immatériel en droit public français

La recherche sur l’ordre public immatériel en droit public français est partie d’un constat : l’interdiction de la dissimulation du visage dans l’espace public a été implicitement fondée par le législateur sur l’ordre public. Pourtant, le législateur ne faisait référence ni à la sécurité, ni à la salubrité ni encore à la tranquillité publiques, considérées comme composant l’ordre public.

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03 09 2018

3 septembre 2018

Les libertés fondamentales au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative

Le référé liberté est désormais bien adulte. Alors que les autres référés d’urgence ont considérablement, mais seulement, été toilettés, le référé-liberté a été créé ex-nihilo par la loi n°2000-597 du 30 juin 2000 relative au référé devant les juridictions administratives et a connu plusieurs vagues de succès.

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28 08 2018

28 août 2018

Une nouvelle liberté fondamentale : la liberté d’aider autrui dans un but humanitaire

C’est une première réplique de la décision du 6 juillet 2018 par laquelle le Conseil constitutionnel a consacré le caractère constitutionnel du principe de fraternité (décision n°2018-717/718 QPC, M. Cédric Herrou et autres). Par une ordonnance de ce 28 août 2018 (JRTA Besançon, 28 août 2018, M. Guardado, n°1801454), le juge des référés du tribunal administratif de Besançon a consacré une nouvelle liberté fondamentale, au sens de l’article L. 521-2 du code de justice administrative : la liberté d’aider autrui dans un but humanitaire.

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23 02 2018

23 février 2018

À l’Assemblée, tenue correcte et expression neutre exigées : Une (très) contestable restriction de la liberté d’expression des députés

  Par le biais d’une récente modification de son instruction générale, le Bureau de l’Assemblée nationale a significativement restreint la liberté d’expression, y compris religieuse, des députés dans l’hémicycle, notamment, en leur imposant une expression « exclusivement orale » et une tenue « neutre », en prohibant l’usage de documents et d’objets divers, et en leur interdisant de porter des signes religieux « ostensibles ». Insusceptible d’être attaquée devant les juridictions administratives et constitutionnelle internes, cette réglementation de l’expression des députés en séance pourrait conduire à une sanction européenne.

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08 06 2016

8 juin 2016

La Loi n’est plus la même pour tous !


En ce début d'été 2016, la loi est-elle encore véritablement la même pour tous ?

Cette question mérite d’être posée, alors que par une décision rendue le 31 mai 2016 (CE, Ass. 31 mai 2016, Mme Gomez-Turri, n°396848), le Conseil d’Etat a, pour autoriser l'exportation de gamètes en vue d'une insémination post-mortem en Espagne, décidé d’écarter ponctuellement l’application d'une loi française, en estimant que celle-ci, pourtant reconnue compatible avec la Convention européenne des droits de l’homme (CEDH), portait une "atteinte manifestement excessive" au droit au respect de la vie privée et familiale de la requérante.

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26 02 2016

26 février 2016

Dans quelle mesure les élus sont-ils soumis aux principes de laïcité et de neutralité religieuse ?


Dans une République « laïque », qui « ne reconnaît aucun culte », les élus publics peuvent-ils, sans enfreindre les principes de laïcité et de neutralité, participer à des manifestations religieuses, se rendre dans des lieux de culte, porter des signes religieux, recevoir ou accepter l’invitation de ministres du culte ou d'associations cultuelles, ou encore, manifester leurs convictions religieuses ?

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05 01 2016

5 janvier 2016

Réflexions sur les décisions du Conseil d’Etat du 11 décembre 2015 Domenjoud et autres : le juge administratif, garant effectif des libertés fondamentales sous l’empire de l’état d’urgence ?


Les décisions, attendues, de la Section du contentieux du Conseil d’Etat, statuant en appel des premières ordonnances en référé-liberté prises par les juges de première instance sur des requêtes visant les mesures de police administratives suite à la déclaration, puis à la prorogation de l’état d’urgence, constituent la quatrième série (sans doute encore incomplète) de décisions de la Haute Assemblée statuant sur les mesures prises dans le cadre de l’état d’urgence, après les décisions rendues suite :

- à la déclaration de l’état d’urgence à compter du 23 avril 1961 (CE 20 décembre 1967 n°71383 Ministre de l’intérieur c. Fabre-Luce, au Recueil),
- à la déclaration de l’état d’urgence en Nouvelle-Calédonie en 1985 (CE 27 juillet 1985 n° 68151 Mme Dagostini, au Recueil),
- à l’application de l’état d’urgence à certaines parties du territoire métropolitain au cours de l’année 2005, enfin (les deux décisions les plus emblématiques de la construction prétorienne du contrôle du recours à l’état d’urgence étant les décisions « Rolin » du 14 novembre 2005, n° 286835 et « Allouache et autres » du 9 décembre 2005, n° 387777).

Les décisions Gauthier et Domenjoud du 11 décembre 2015 viennent, pour la première fois depuis la décision Dagostini, encadrer l’office du juge administratif, seul compétent pour connaître des recours contre les mesures prises sur le fondement de l’article 6 de la loi du 3 avril 1995 dans sa version issue de la loi n° 2015-1051 du 20 novembre 2015 ; cette même loi ouvrait d’ailleurs logiquement, et heureusement, la voie de droit constituée par la procédure prévue à l’article L. 521-2 du code de justice administrative aux personnes visées par des mesures d’assignation à résidence, en adaptant à l’état actuel du droit la rédaction de l’article 14-1 de la loi du 3 avril 1955.

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12 12 2015

12 décembre 2015

État d’urgence : rapide aperçu des décisions de Section du 11 décembre 2015


Dans le cadre de l’état d’urgence, déclaré par décret du 14 novembre 2015 et prorogé par la loi n° 2015-1501 du 20 novembre 2015, qui a également modifié la loi n° 55-385 du 3 avril 1955 relative à l'état d'urgence aux fins de « renforcer l'efficacité de ses dispositions », le ministre de l’intérieur a décidé, en application de l’article 6 de cette loi, d’assigner à résidence des militants écologistes qui auraient préparé des actions de contestation visant à s’opposer à la tenue et au bon déroulement de la « COP 21 ».

Certaines personnes visées par ces mesures en ont sollicité la suspension, sur le fondement de l’article L. 521-2 du code de justice administrative (référé liberté), auprès du juge des référés du tribunal administratif territorialement compétent. Ces recours ont tous été rejetés, certains, après audience, pour absence d’atteinte grave et manifestement illégale à une liberté fondamentale, d’autres pour défaut d’urgence selon la procédure dite « de tri » (article L. 522-3 du code de justice administrative), c’est-à-dire sans procédure contradictoire ni audience. L’utilisation de cette procédure a une incidence directe sur les voies de recours, dès lors qu’elle ferme la voie de l’appel devant le Conseil d’État, seul un pourvoi en cassation pouvant alors formé (CE, Sect., 28 février 2001, Casanovas, n° 229.163, Rec., p. 107 : AJDA 2001, p. 465, chron. M. Guyomar et P. Collin ; RFDA 2001, p. 399, concl. P. Fombeur).

Le Conseil d’État était ainsi saisi de six pourvois dirigés contre des ordonnances de tri et le juge des référés du Conseil d’État d’un appel contre une ordonnance de référé ordinaire. La Ligue des droits de l’homme est intervenue volontairement à ces instances et une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) portant sur la loi du 3 avril 1955 modifiée a été soulevée par l’un des requérants.

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08 10 2015

8 octobre 2015

Informer ou protéger, il faut choisir : Quand le droit d’accès aux documents administratifs se heurte à la protection de la vie privée des administrés

(Note sur : CE, 21 sept. 2015, n°369808, sera publié au recueil Lebon)

Par un arrêt rendu le 21 septembre 2015, le Conseil d’Etat a précisé les conditions dans lesquelles le droit d’accès aux documents administratifs dont les conclusions sont opposées à une personne, institué par l’article 3 de la loi du 17 juillet 1978, doit être concilié avec les restrictions et exceptions à la communication de documents administratifs prévues par l’article 6 de cette même loi.

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19 03 2010

19 mars 2010

Fichier « ELOI » : Suite et fin

Note sous Conseil d’État, 30 décembre 2009, Association SOS Racisme – Groupe d’information et de soutien aux immigrés et autres, Req. nos 312051-313760.

La question de la création de fichiers de données par le pouvoir réglementaire et de leur utilisation par les autorités administrative, policière et judiciaire se pose avec d’autant plus d’acuité que leur création s’accélère depuis 1987, date de la mise en place du fichier automatisé des empreintes digitales : 1998 pour les empreintes génétiques, 2001 pour le fichier de police relatif aux infractions constatées (2006 pour le fichier du même type pour la gendarmerie), 2004 pour celui relatif aux infractions sexuelles, etc. D’ailleurs, dès 2006, Alex Türk soulignait, lors de la conférence internationale des commissaires à la protection des données de Londres, qu’une « vague "sécuritaire" traduite par la création ou l’extension de nombreux fichiers et la mise en place, au profit des autorités de police, de nouveaux moyens d’investigation dans les systèmes d’information, pourrait bien submerger nos autorités. »[1]

Notes

[1] CNIL, Rapport d’activités 2006, Paris, La Documentation française, 2007, p. 89

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13 11 2008

13 novembre 2008

La burqa saisie par le droit : les récentes décisions du Conseil d’Etat et de la Halde

Le Blog Droit administratif est heureux d'accueillir ce billet d'actualité sur un sujet qui suscitera assurément d'intéressants débats juridiques. Nous remercions son auteur, conseiller de tribunal administratif, d'avoir répondu à notre appel à contribution en espérant que son heureuse initiative en entraînera d'autres.

Le port de la burqa (ou « niqab »), voile complet revêtu par certaines femmes musulmanes a fait l'objet ces derniers mois de prises de position jurisprudentielles, d'une part, par la haute autorité de lutte contre les discriminations (Halde), d'autre part, par le Conseil d'Etat, statuant dans une affaire d'accès à la nationalité française.

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26 05 2008

26 mai 2008

Le droit au logement décent et indépendant (DALDI), premières ordonnances de référé… suspension

Alors que les médias se font largement écho de l’ordonnance rendue par un juge des référés d’un Tribunal administratif sur un référé-suspension (TA Paris, réf., 20 mai 2008, Mme Fofana et Association Droit au logement Paris et ses environs, n°0807829/9/1), devançant l’application de la loi du 5 mars 2007 sur le droit au logement opposable dont la justiciabilité n’est ouverte qu’à compter du 1er décembre 2008 (Article L 441-2-3-1 I du code de la construction et de l’habitation), notre attention a aussi été attirée par une ordonnance du Tribunal administratif de Toulouse du 11 avril 2008 et par une lettre du ministère de l’Immigration au président du comité de suivi du « droit au logement opposable » à l’initiative de l’association France terre d’asile. Elles permettent de se pencher sur la question de l’application du droit à un logement décent et indépendant aux demandeurs d’asile déboutés et aux réfugiés.

Après quelques considérations sur l’utilisation du référé-suspension pour accéder à la procédure de Droit au logement décent et indépendant (DALDI) issu de la loi du 5 mars 2007 (I), il s’agira de souligner les spécificités de la situation des demandeurs d’asile déboutés et des réfugiés (II Second papier à venir).

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22 01 2007

22 janvier 2007

Une indigne « soupe de cochons »

Par Mehdi YAZI-ROMAN
Juriste territorial
Chargé d’enseignement à l’Université de Versailles – Saint-Quentin-en-Yvelines

Les questions du logement et de la nourriture des sans-abris sont, au sens propre du terme, sur la place publique depuis le début de l'hiver. Mais tandis qu'une dynamique politique s'est amorcée sur la première, une tourmente juridique s'est déclenchée en ce qui concerne la seconde avec pour origine un slogan : « Les nôtres avant les autres ».

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