Le blog Droit administratif

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24 11 2006

Attention : réforme imminente

Nous apprenons sur le site du Conseil constitutionnel que celui-ci a été saisi aujourd’hui par le Gouvernement d’une demande de « délégalisation » de certaines dispositions du Code de justice administrative. Sans plus de précisions.

Ce n’est un secret pour personne, Serge SLAMA nous en parlait récemment ici même, un projet de décret réformant la procédure contentieuse administrative est en préparation depuis plusieurs mois. Il vise à étendre le recours au juge unique devant les tribunaux administratifs, notamment en matière de contentieux des étrangers à la suite de la loi du 24 juillet 2006 (dite loi Sarkozy) relative à l’immigration et à l’intégration[1]. Ce projet a motivé une grève des magistrats administratifs le 7 juin dernier et continue à fortement les mobiliser.

Cependant, si la dérogation au principe de collégialité relève probablement du domaine de la loi (celle-ci déterminant les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques), elle peut intervenir par décret sur le fondement des dispositions de l’article L. 222-1 du Code de justice administrative.

La saisine du Conseil constitutionnel est donc nécessairement étrangère à cette question. Mais quelle réforme peut alors cacher cette demande ?

Je penche pour le changement de dénomination du commissaire du Gouvernement, dont Alexandre nous parlait il y a quelques semaines. En effet, cette dénomination est actuellement fixée par la loi à l’article L. 7 du Code de justice administrative. La saisine du Conseil constitutionnel apparaît donc nécessaire pour la changer et là est certainement l’explication.

Toutes les suppositions sur la nouvelle dénomination continuent, quant à elles, à courir. Les deux favoris sont, toutefois, « commissaire à la loi » et « commissaire du droit ».

Je pense, pour ma part, que tant qu’à changer le nom du commissaire du Gouvernement pour démontrer son indépendance, autant le dénommer « commissaire indépendant ».

Commentaires

Serge Slama dit :

J’ai une autre suggestion (mais ça n’a peut-être rien à voir)
Lors du colloque à St Denis le 17 novembre sur la réforme des mesures d’éloignement (dont vous vous êtes fait écho), plusieurs avocats "militants" ont fait valoir que dans la mesure où il n’y avait pas de commission d’office d’avocat comme dans le contentieux de la reconduite à la frontière, le contentieux des refus de séjour assortis d’une OQTF relèverait du droit commun de l’AJ, cad que le dépôt d’une demande d’AJ suspendrait les délais de recours.
Martingale qui aurait pour effet de faire s’effondrer tous les délais de la nouvelle procédure puisque, comme je l’ai écrit, le délai de recours est d’un mois (corrélé avec la fin du délai imparti pour partir avec l’aide de l’ANAEM et ouvrant la possibilité de placer en rétention dans la première année de l’OQTF) et celui de jugement de 3 mois.

Ce n’est manifestement pas passé dans l’oreille d’un sourd (le "Conseil d’Etat" étant présent et représenté…).

Or, en parallèle, on apprend:
– le report provisoire de l’examen du texte qui devait être soumis au CSTA-CAA fin novembre;

– et, semble-t-il, le dépôt d’un amendement sur l’AJ dans la LFR…

Peut-être que tout cela n’est qu’une coincidence fortuite…

Authueil dit :

Y a quelque chose à gagner pour la bonne réponse ? 🙂

Le changement d’appellation du commissaire du gouvernement me semble la solution la plus logique. D’autant qu’elle serait opérée avant l’arrivée au Conseil constitutionnel de Renaud Denoix de Saint Marc (en février, semble-t-il en tant que Président) qui y était apparemment hostile.

Serge Slama dit :

Qu’est-ce qu’on gagne?
Au choix, une OQTF vers la destination de son choix ou les conclusions du premier commissaire à la loi début 2007…

Oui il semble en effet que ça soit lié au changement d’appelation du commissaire du gouvernement, qui avait tjs été bloqué par RDSM.

Yann dit :

Je penche également pour le commissaire à la loi, grand vainqueur (en sursis) du concours de beauté de la théorie des apparences. Commissaire à la loi, pour s’aligner sur la dénomination la plus souvent utilisée dans les autres pays francophones pourvus de cette institution.

zoopol dit :

Pourquoi s’aligner sur cette dénomination ridicule? "Commissaire à"? "La loi"?

Pendant ce temps, nos professeurs nous enseignent que la légalité n’est plus la seulement "la loi, expression de la volonté générale" souveraine et que l’expression "contrôle de légalité" est un archaïsme…

Loge dit :

Pourquoi commissaire ? Ca fait flic.

zoopol dit :

En tout cas, c’était bien ça: "les mots «commissaire du gouvernement» ont un caractère réglementaire":

http://www.conseil-constitutionn...

Tom dit :

Je m’interroge sur un " bug " possible.

La demande de déclassement du titre en question ne concerne que deux articles du CJA (art. L. 7 et L. 522-1)… alors que celui-ci se retrouve en un troisème (art. L. 781-1, voir le dossier documentaire sur le site du CC).

Certes, la 3ème mention a été créée par une ordonnance non ratifiée (ordonnance 2005-657, qui reste donc de nature réglementaire), mais il me semblait que le délai où le gouvernement pouvait modifier l’ordonnance était épuisé (je n’ai pas eu le temps de creuser…).

Tom dit :

Après consultation du Chapus, DAG, t. 1, il apparaît qu’une ordonnance non ratifiée peut être modifiée sur les dispositions de nature réglementaire (ce qui est le cas pour l’appellation de " commissaire de gouvernement" !), par un décret en conseil des ministre, après consultation obligatoire du Conseil d’Etat. Donc il n’y a pas de " bug "…

Merci à Zoopol pour cette veille attentive et à Tom pour cette précision.

Elodie dit :

en tout cas, je tiens personnellement à féliciter François pour sa perspicacité ! Bravo 😉

ta13 dit :

juge de ta, je vous indique que l’appellation envisagée par le CE est "commissaire du droit"., je le tiens de collègues ayant suivi récemment une formation sur la fonction de comm du gvt au CE;
par ailleurs, je trouve votre site très intéressant.

Apparemment rien n’est encore décidé, un conseiller d’Etat m’avait parlé de "commissaire à la loi".

J’ai eu les mêmes échos que TA13. Visiblement, la dénomination de "commissaire à la loi", initialement pressentie, serait abandonnée au profit de "commissaire du droit".

Je continue, pour ma part, à penser que "commissaire indépendant" ou "avocat général" constitueraient de meilleures appellations.

manuel dit :

Quel suspense !!!

A quelle date (ou a peu près) connaîtra-t-on le choix définitif ?

Tom dit :

Justice-Fiction :

MM. Meye… ou Hoffe… feront-ils un recours contre le décret qui changera l’appellation du commissaire ?
Quels seront les moyens de droit invoqués ?
Y aura-t-il une amende pour recours abusif ?

Snakes dit :

Et le contrôle de la loi de transposition avec la directive communautaire, ca n’intéresse personne ?

Personnellement, je suis pour …Commissaire du gouvernement.

"commissaire départi", d’après Toqueville c’était ainsi que l’on appelait également les intendants au XVIIIe siècle. Et phonétiquement c’est en prise directe avec la jp de la cedh

Serge Slama dit :

En tout cas c’est l’un des plus court commentaire au CCC jamais vu…
sous titre possible: "Vite vite avant qu’il n’arrive de chez le voisin…."

A propos d’ordonnance non ratifiée, à l’Assemblée du contentieux d’aujourd’hui été audiencée une affaire "conseil national de l’Ordre des médecins" sur une demande d’abrogation d’une ordonnance non ratifiée de l’article 38C alors que le délai d’habilitation est expiré.

La question était de savoir s’il fallait maintenir, pour les ordonnance article 38, les arrêts Vedel et Janot de 1995 (sur le législateur colonial, sénatus-consulte de 154), Gisti du 22 octobre 2003 (médaille de la famille française, décret 1982) et Gisti du 7 février 2003 (décret-loi de 1939).

Quelqu’un a-t-il assisté à l’audience pour dire le sens des conclusions?

Tom dit :

@Serge Slama

Cela sent un futur grand arrêt possible, non ? Peut-être le contrôle éventuel des dispositions de nature législative des ordonnances non ratifiées après l’expiration du délai d’habilitation ?
(J’imagine, car pour les dispositions de nature réglementaire d’une telle ordonnance, je doute que cela nécessite un arrêt d’Assemblée.)

Serge Slama dit :

Un grand arrêt, sûrement pas. En revanche une bonne place dans le commentaire sous l’arrêt Alitalia.
Le GAJA pourrait davantage être CE, Sect. 5 mai 2006 Schmitt, RFDA, n°4, p.678, compte tenu de la controverse qui l’a précédé (l’été des ordonnances de P. Delvolvé).

ta13 dit :

information (date de fraicheur : aujourd’hui) par une autre source (syndicale) : l’intitulé serait bien "commissaire du droit"

Martin dit :

Cher TA 13,

Je profite de cette agitation autour de la future dénomination du commissaire du gouvernement pour te demander tes impressions sur le métier de conseiller de TA, sur le recrutement complémentaire (si tu en est issu) et sur l’ambiance et les conditions de travail au TA de Marseille (dans l’hypothèse ou ton pseudo serait en rapport avec ton affectation géographique…).
Envisageant de me présenter prochainement au concours des TA, toute information sur celui-ci et, de manière plus générale, sur le métier de magistrat administratif est, pour moi, des plus précieuses.

Merci d’avance.

mat 59 dit :

Je viens d’apprendre suite au compte rendu de l’USMA du dernier conseil supérieur des TA et CAA, que la formation pour las futurs magistarts issus du concours compélmentaire, débuterait dès le 1er juillet

Or, normalement c’est à cette période qu’ont lieu les épreuves orales

Qui a des infos sur cette question?

Folcheran dit :

La possibilité de modifier les dispositions de caractère réglementaire d’une ordonnance non ratifiée figure dans le dernier alinéa de l’article 38 de la Constitution :
" A l’expiration du délai mentionné au premier alinéa du présent article, les ordonnances ne peuvent plus être modifiées que par la loi dans les matières qui sont du domaine législatif. "

Tom dit :

Suite du n° 20 (Serge Slama)

Voici un extrait de l’arrêt final

Section du contentieux – Lecture du 11 décembre 2006
N°279517, 283983, CONSEIL NATIONAL DE L’ORDRE DES MEDECINS

"Considérant qu’il résulte de ces dispositions que si une ordonnance prise sur le fondement de l’article 38 de la Constitution conserve, aussi longtemps que le Parlement ne l’a pas ratifiée expressément ou de manière implicite, le caractère d’un acte administratif, celles de ses dispositions qui relèvent du domaine de la loi ne peuvent plus, après l’expiration du délai d’habilitation conférée au gouvernement, être modifiées ou abrogées que par le législateur ou sur le fondement d’une nouvelle habilitation qui serait donnée au gouvernement ; que l’expiration du délai fixé par la loi d’habilitation fait ainsi obstacle à ce que l’autorité investie du pouvoir règlementaire fasse droit à une demande d’abrogation portant sur les dispositions d’une ordonnance relevant du domaine de la loi, quand bien même seraient-elles entachées d’illégalité…"

lulu 94 dit :

Vous serait-il possible de blogger sur le contenu de votre métier plus que sur son appellation? même si les ressorts dialectiques de vos échanges révélent un intérêt "substantiel", je recherche avant tout des informations sur le métier de magistrat administratif, sous forme de vécu.
Vous vous êtes arrêté en décembre 2006, et depuis?

Go ped dit :

Je viens d’apprendre suite au compte rendu de l’USMA du dernier conseil supérieur des TA et CAA, que la formation pour las futurs magistarts issus du concours compélmentaire, débuterait dès le 1er juillet

Attendre et espérer dit :

pouvez-vous en préciser davantage ? est-ce à dire que le concours va être repoussé ?

Attendre et espérer dit :

pouvez-vous en préciser davantage ? est-ce à dire que le concours va être repoussé ?

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