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21 06 2006

La présence du commissaire du Gouvernement au délibéré à nouveau condamnée par la CEDH

J’apprends, via le blog de Cacambo, que la Cour européenne des droits de l’homme a de nouveau conclu à la violation de l’article 6 § 1 de la Convention du fait de la présence du commissaire du Gouvernement au délibéré, dans un arrêt Malquarti c./ France du 20 juin 2006.

La distinction faite par le Gouvernement français (d’une particulière mauvaise foi comme j’ai déjà eu l’occasion de le dire) entre participation et présence est très clairement écartée :

« La Cour rappelle que le grief tiré de la « participation » ou, indifféremment, de la « présence » du commissaire du gouvernement au délibéré de la formation de jugement du Conseil d’Etat a déjà été examiné par elle dans l’arrêt Kress (…), ainsi que dans l’arrêt Martinie ».

Commentaires

Ognouf.com dit :

Ils sont buggés, au Conseil d’Etat ? Ou alors ils ont décidé de plaider pour une sortie de la France de l’U.E. ?

Vivement la privatisation 🙂

somni dit :

C’est aussi le gouvernement qui est "buggé" puisque cette distinction "présence /partipation" est présente dans le dernier décret 2005-1586. On trouve sur le site du ministére de la justice ceci : "Le décret du 19 décembre s’attache, en outre, à mieux définir le rôle du Commissaire du gouvernement par rapport à la formation de jugement devant laquelle il prononce ses conclusions. Sa présence à l’occasion des délibérés auxquels il ne prend pas part, qui est une tradition constante des juridictions administratives, lui permet de mieux saisir les conditions dans lesquelles la décision est prise. Il connaît ainsi les tendances internes à la juridiction. Il en tient compte lors de l’examen des affaires sur lesquelles il est appelé à conclure. Par ce biais, il assure la cohérence, la continuité et au besoin le développement de la jurisprudence, pour une bonne administration de la justice."
http://www.justice.gouv.fr/actua...

On peut trouver la position de la CEDH regrettable, et même contreproductive pour les justiciables, ainsi que critiquable et bien faible la théorie des apparences sur laquelle elle s’appuit, ce qui est mon cas. Mais je ne pense que pas que l’ojn puisse attendre de sa part un revirement, tant sa position paraît maintenant acquise. La résistance de la France pourrait même avoir un résultat opposé à celui qui est recherché.

GroM dit :

Somni, tout à fait d’accord. Voir à ce sujet l’évolution du partage des voix au sein de la CEDH depuis Kress: le CE a réussi a faire l’unanimité sur une question initialement assez partagée. Cette attitude française est tout à fait regrettable.

zoopol dit :

Je pense qu’il ne faut pas dissocier la position du Conseil d’Etat et celle du Gouvernement dans cette affaire. Le décret du 19 décembre 2005 fut pris en Conseil d’Etat, M. Genevois est intervenu dans sa rédaction.

On attend avec impatience la décision du Conseil d’Etat sur la légalité du décret après l’arrêt Martinie c. France. Le référé suspension a d’ores et déjà été rejeté par… M. Genevois:

zoopolitikon.free.fr/blog…

snakes dit :

@zoopol : Je doute franchement que M. GENEVOIS soit réellement intervenu dans la rédaction du décret, eu égard notamment à sa fonction de président de la section du Contentieux.

Si on peut en vouloir au Conseil pour ses positions dans cette affaire, l’institution respecte tout de même les exigences d’impartialité objective…imposées par la convention elle-même…

Béné dit :

bonjour,
juste une question: n’y a-t-il pas un décret en préparation, qui prévoirait la possibilité de laisser le choix aux parties en ce qui concerne la présence du commissaire du gouvernement lors du délibéré, et qui contournerait la jp de la CrEDH?

François dit :

Béné :

Il y a bien un décret en préparation, mais je n’en connais pas les termes.

béné dit :

en fait,
je prépare le CRFPA, et lors des simulations au grand O ce matin à Paris II, c’est l’un des membres du jury qui a évoqué ce texte en préparation…
affaire à suivre donc!

PS: super votre blog!
PPS: ainsi que les "blogs amis" d’ailleurs!

zoopol dit :

Pardonnez-moi, M. Genevois n’est peut-être pas intervenu directement mais quand je disais qu’il est « intervenu », c’est en ce qu’il est parmi les premiers à avoir fait surgir la distinction participation/présence et à l’avoir défendue. Partant son autorité morale a été indiscutable.

Quant à l’argument de l’impartialité objective, nous verrons bientôt ce qu’il en est, apparemment (voir cacambo.over-blog.net/art… )… (mais c’est une boutade jusqu’à preuve du contraire).

ognouf.com dit :

Quelque chose me semble terriblement obscur dans toute cette affaire :

Que fait exactement le commissaire du gouvernement en ces circonstances pendant lesquelles on lui reproche d’être présent ?

S’il n’influence pas la décision, ne peut-il pas se contenter de visionner à posteriori une vidéo des débats ?

zoopol dit :

Sur la vidéo, l’idée a été lancée, puis rejetée (manque de moyens évident, même si le principe lui-même est plutôt séduisant).

C’est la présence et non les actions éventuelles du CG qui pose problème au regard de la théorie de l’apparence: le justiciable entend le CG qui prononce des conclusions dans un certain sens, mais rester présent auprès des magistrats lors du délibéré. Le problème n’est pas tant ce qu’il fait vraiment (ce qui, de toute façon, est invérifiable), que le fait qu’il soit simplement présent.

ognouf.com dit :

"Sur la vidéo, l’idée a été lancée, puis rejetée (manque de moyens évident, même si le principe lui-même est plutôt séduisant)."

Manque de moyens ???

On leur a ptet pas dit, mais payer un juge à "regarder parler" d’autres juges, ça doit coûter à peu près autant par heure que deux caméras DV de base.

zoopol dit :

Oui mais vous savez que la justice, comme les autres administrations publiques, manquent cruellement de moyens.

Il y avait un article dans Libération hier, ce qui me permet d’ailleurs de répondre à un échange sous le billet « Le Bal des Outrés » de ce blog:

http://www.liberation.fr/page.ph...

François dit :

Béné :

Vos informations étaient bonnes.

Béné dit :

je suis soulagée de ne pas avoir disséminé une fausse information sur un blog d’une aussi grande qualité…OUF …!

Cela dit, les intervenants de Paris II semblent souvent bien renseignés…
je retourne à mes chères études, et continue de profiter de vos commentaires, toujours très à propos! (je compte bien les exploiter le jour J).

très bon dimanche,

Béné

Tom dit :

Projet de décret modifiant le CJA sur ce point :

Cf. http://www.opuscitatum.com/modul...

Le Conseil d’Etat a présenté trois avant-projets de rédaction de l’article R 731-7 du code de justice administrative aux représentants des syndicats de magistrats administratifs (21 juin 2006).

Le SJA en rend compte sur http://www.sja-juradm.org/articl...

Voici les trois rédactions envisagées pour l’article R 731-7 du CJA :

Première proposition : "Le commissaire du gouvernement ne participe pas au délibéré. Sauf demande contraire d’une partie, il peut y assister".

Deuxième proposition : "Le commissaire du gouvernement ne participe pas au délibéré. Sauf demande contraire d’une partie, il peut être autorisé à y assister par le président de la formation de jugement".

Troisième proposition : "Le commissaire du gouvernement ne participe pas au délibéré. Au Conseil d’Etat, sauf demande contraire d’une partie, il peut y assister".

Le SJA manifeste son attachement l’institution du commissaire du gouvernement et souhaite, pour le préserver, que la France s’aligne complétement sur la jurisprudence de la CEDH et propose un article du CJA du type : "Le commissaire du gouvernement n’assiste pas au délibéré".

alice dit :

pouvez vous m’expliquer quelle peut être l’influence concrète du commissaire de gouvernement lors de l’audience? merci

Sophia dit :

bonjour! étudiante en 2ème année droit j’ aimerais qu vous m’aidiez à comprendre l’une des nombreuses questions relatives au CG..
Pourquoi la décision de la CEDH concernant la participation au délibéré est critiquée?Car, (malgré le risque de l’utilisation de la théorie des apparences pour justifier cela..) , l’énnoncé de ses conclusions ne suffit-il pas? Le CG jouerait-il un rôle important lors du délibéré?

ND dit :

La tradition veut qu’il ne participe pas, mais qu’il y assiste. Et en tant que rouage-clé des juridictions administratives, le fait qu’il assiste au délibéré lui permet de bien comprendre les raisonnements qui ont conduit au jugement et donc d’améliorer ses conclusions futures de par son intimité avec les raisonnements des formations de jugement.

Laurent dit :

bonjour! Je suis étudiant en droit (L2s1) et je dois rendre un commentaire de l’arrêt martinie (enfin, une version édulcorée et tronquée qui tient sur deux pages!).
Je pense avoir saisi son intérêt mais je n’arrive pas à bien formaliser mon devoir…
Auriez-vous des suggestions de plans dichotomiques??? Vous avez tous l’air assez bien informé!

xavier dit :

mais vous racontez tous n’importe quoi. la position de la cour de strasbourg fait du commissaire du gouv une sorte de partie au procés en lui appliquant le principe de l’égalité des armes, elle nie la spécificité du ministére public. elle refuse le dialogue des juges en s’entêtant dans sa position de principe dégagée en 1991, tandis que la france tente de trouver des voies médianes: simple présence et non participation sur demande des parties, ne nous trompons pas de victime les enfants, la théorie des apparences est une fumante arnaque un concept pour le moins douteux d’un point de vue juridique, il faut lire Mr Pacteau sur ce point là, ou Mr Sudre !

xavier dit :

mais vous racontez tous n’importe quoi. la position de la cour de strasbourg fait du commissaire du gouv une sorte de partie au procés en lui appliquant le principe de l’égalité des armes, elle nie la spécificité du ministére public. elle refuse le dialogue des juges en s’entêtant dans sa position de principe dégagée en 1991, tandis que la france tente de trouver des voies médianes: simple présence et non participation sur demande des parties, ne nous trompons pas de victime les enfants, la théorie des apparences est une fumante arnaque un concept pour le moins douteux d’un point de vue juridique, il faut lire Mr Pacteau sur ce point là, ou Mr Sudre !

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